Le domaine de montlaur

le charme discret d'une demeure familiale

L'HISTOIRE DU DOMAINE AU FIL DU TEMPS




Sur le plan du parc érigé vers 1880 pour Paul Mas (1837-1899), propriétaire alors du domaine, le château apparaît coiffé d’un toit à la Mansart en ardoise qu’ornent d’imposantes lucarnes de plomb venant ajouter un étage à l’édifice.

La région, véritable Eldorado du vin, connaît alors un essor fabuleux. Rivalisant de splendeur, les châteaux poussent comme des champignons. Le paraître est à son comble. On se doit de bâtir riche, grand, imposant. Comme le sera l’étonnant bâtiment (54 mètres de long sur 8 mètres de large) qui comprend le groupe scolaire et la mairie de Montlaur aux proportions dignes d’un hôtel de ville que fait édifier en 1902 Paul Mas, maire du village, sur un terrain qu’il offre à la commune.

Grand bâtisseur, l’élu-châtelain poursuit ainsi son œuvre. Ne vient-il pas d’agrandir considérablement son château,  l'ancienne demeure de Gabriel de Barthélémy de Gramont de Lanta (1594-1652) bâtie en 1636, en le surélevant de deux étages et le dotant d'escaliers d’honneur, de salons de réceptions, de galeries, de terrasses?

Et de couronner en 1878 le clocher de l’église du village d’une flèche recouverte d'ardoises? Ainsi, la mairie, le château, l'église, aux couvertures d’ardoise si peu audoises mais si chères à Viollet-le-Duc qui vient de réveiller la Cité de Carcassonne toute proche, forment un tout.


Ci dessus le bureau d'Edouard Niermans au Château de Montlaur vers 1930.






(Photos vers 1925)



Des allées d’oliviers, des chemins ombragés bordés d’Ophiopogon Japonicus, des arbres remarquables , pins Sapo, tilleuls, noyers d’Amérique, cyprès majestueux évoquant l’Italie… hors du temps, le lieu invite à la rêverie .

Au fond du parc une statue de Bacchus rendant hommage au travail de la vigne venait autrefois clore la spectaculaire allée de platanes d’Orient — plantée dans l’axe de la salle de billard du château pour être vue du premier étage de la demeure —

En mauvais état et jugée inesthétique, la toiture à la Mansart du château sera remplacée dans les années cinquante par une couverture en tuiles canal jugée plus en harmonie avec l’architecture régionale.

Seule la tour ouest conservera son revêtement d'ardoise en mémoire du passé… et en hommage à la famille Mas qui orna l’escalier d'honneur du château d’un blason surmonté de fourches, de faux, de grappes de raisin et d’épis de blé évoquant la vocation agreste du domaine. Et à Paul Mas, à qui l'on doit l'aménagement du parc qui s'inscrit comme une des grandes réalisations paysagères de l’époque florissante de la viticulture du Languedoc.

Aujourd'hui le parc du Domaine de Montlaur compte parmi les plus beaux jardins de l'Aude.

Le plan du parc du château




Créé vers la fin la fin du XIXe siècle par Paul Mas, l’ensemble du jardin n’a depuis subi peu de transformations,. On retrouve l'allée de platanes,  l'allée  des fleurs. le bosquet. La piscine actuelle a été implantée à l’emplacement du grand bassin jamais exécuté.

LE PAVILLON DU RÉGISSEUR et LA MAISON VIGNERONNE




Nombre de bâtiments faisaient partie du Domaine de Montlaur. Construit en 1900, le Pavillon du Régisseur situé à l’entrée de la propriété était la résidence du chef des cultures qui dirigeait l’ensemble du domaine. Régisseur dit «à canne», il administrait, distribuait et contrôlait le travail des «gagés», veillant avec autorité au bon déroulement de la récolte et de la vinification. Pour lui, point de sécateur, ni de bêche, ni de hotte… mais une canne.


De l’autre côté de la route, la Maison du Village, un ancien ramonétage, accueillait les familles des «gagés» et des «ramonés», les personnes qui prenaient soin des chevaux. Construite au XVIIe siècle avec en partie, comme la plupart des maisons du village, les pierres du fort médiéval de Montlaur autour duquel le village s’est formé, elle abrita la cave de "Moussié" (monsieur), la première cave du domaine. Sur la façade sud, un arc en pierres appareillées figure l’ancienne ouverture des chais. Déposée à l’étage, la récolte tombait directement dans des foudres de chêne.

C’est là que par la suite furent logés les vendangeurs. Là aussi que vécut Élise, la jardinière du château qui ratissait les allées du parc en maudissant les marrons qui ne cessaient de tomber.


Face à la Maison du Village, l’étrange tour crénelée faisait autrefois partie des dépendances de la propriété qui comprenaient — entre autres les anciennes écurie qui la jouxtent. Aux pieds de ce curieux édifice, château d’eau du domaine, tournait continuellement un âne qui actionnait une pompe acheminant l’eau d’un puits jusqu’à un réservoir situé au sommet de la tour. Ce dernier alimentait par gravité le premier étage du château ainsi que la cave et le circuit hydraulique enterré du parc permettant l’arrosage du jardin et de l’ancien potager (aujourd’hui terrain de boules et lotissement de la commune). L’électricité remplaça les ânes, puis l’adduction d’eau, le château d’eau.

Montlaur — val de dagne




La légende dit que le village de Montlaur, le «mont des lauriers», tient son nom des victoires de Charlemagne sur les Infidèles. Mais ces lauriers vieux de plus de douze siècles sont trop anciens pour être véridiques. Reste que le village de Montlaur —  aujourd'hui  commune de Val de Dagne après avoir fusionné avec le village de Pradelles  en Val tout proche —, ancien fief des abbés de Lagrasse , s'est construit autour d’un fort bâti vers 1170 sur l’ordre de Roger II Trencavel  (1149- 1194), vicomte de Béziers, de Carcassonne et d’Albi.


Tombés quarante ans plus tard dans l’hérésie cathare, les habitants de Montlaur et son seigneur sont  pourchassé par Simon de Montfort qui s’empare de la place forte en 1210.


Un siècle encore, la forteresse à la double enceinte n’est plus qu’un souvenir que les guerres de Religion achèvent.


Enfin en 1632, le baron de Moux et ses deux fils ralliés à Henri II de Montmorency, gouverneur du Languedoc (qui soutient Gaston d'Orléans dans sa cavale contre son frère, le roi Louis XIII), assiègent le bastion de Montlaur resté fidèle au roi et à l’abbé de Lagrasse. Des boulets perdus atteignent l’église édifiée en 1399. Abattu, le clocher s'effondre sur la sacristie.


L’année suivante on répare les dégâts de la guerre. Trois ans plus tard, Gabriel de Barthélémy de Gramont de Lanta  (1594-1652)  — dont la famille s'alliera à celle de Pierre-Paul Riquet , le bâtisseur du Canal du Midi — reconstruit l’église en place de l’ancien cimetière et la dote de deux chapelles (deux autres datent de la Troisième République). En témoignent la clef de voûte de l’édifice qui porte la date de 1636 et l’inscription «Vive le roy» taillée dans un écusson.


La guerre était finie. On employa les pierres du fort pour rebâtir la Maison de Dieu et la population s’installa hors les murs, profitant du mouvement de démolition de la citadelle pour construire granges et maisons.

Les Frères Niermans et la chapelle Saint Michel




En 1921,  à la mort d'Edouard Niermans, Jean (1897- 1989) Premier Grand Prix de Rome et son jeune frère Édouard (1904-1980), tous deux architectes , poursuivirent l'œuvre de leur père. Reprenant son cabinet d’architecture  sous le nom  «Les Frères Niermans» ils bâtissent ensemble l’Hôtel de Ville et le groupe scolaire Marius Jacotot de Puteaux, le théâtre du Palais de Chaillot, les salles de concert de la Maison de la Radio à Paris et l’Hôtel de ville d’Alger.




Jean (1897- 1989) Premier Grand Prix de Rome   — à droite  — et son jeune frère Édouard (1904-1980) — à gauche —  poursuivent l'engagement  de leur père . A la mort de ce dernier, ils fondent en  1928, le cabinet d'architecture Les Frères Niermans. 


Ci dessous, . Détail du bas relief de l'Hôtel de Ville de Puteaux .Sculpteur Alfred Janniot, premier prix de Rome.



Au retour de son séjour de la Villa Medicis à Rome , Jean Niermans signera la fresque de  «Saint Michel terrassant le dragon» dans la chapelle Saint-Michel de l’église paroissiale de Montlaur. Dédié à Sainte Eulalie, ce lieu de culte fut édifié en 1636 par Gabriel de Barthélémy de Gramont de Lanta dans l’espoir d’une descendance. Le ciel exauça les vœux de cet homme pieux et ceux de son épouse Anne de Malacoste . La même année ils eurent une fille qu’ils prénommèrent Noble Jaquette pour qui ils firent bâtir le château de Montlaur.


Rendant grâce à Dieu, la chapelle Saint-Michel de l’église de Montlaur est depuis dévolue au Domaine de Montlaur.